Responsables
Claudine Gauthier (CNRS-EHESS) et Fabrizio Speziale (EHESS)
Cet axe vise à renouveler l’étude du Patrimoine, envisagé comme objet polymorphe et en perpétuel devenir, à partir d’études de cas interrogeant le domaine iranien produites par une équipe pluridisciplinaire réunissant principalement ethnologues, archéologues, historiens et linguistes, mais aussi acteurs des phénomènes contemporains de mise en patrimoine (porteurs de projets patrimoniaux, experts de l’UNESCO, chercheurs travaillant sur les politiques patrimoniales de l’UNESCO).
Le Patrimoine comme ensemble de biens culturels matériels et immatériels est, de nos jours, une catégorie si familière, si fréquemment mobilisée au quotidien qu’elle semble presque immanente. Il n’en est rien pourtant. La conscience, pour ne pas dire la sensibilité patrimoniale au sens moderne est une invention relativement récente, surtout si l’on considère l’âge de certains des objets qu’elle s’approprie et qui peuvent avoir traversé plusieurs millions d’années, tels les célèbres Kaluts du désert de Lut en Iran. Ainsi, en France, le souci de sauvegarde des traces du passé ne s’affirme-t-il vraiment qu’à partir du début du XIXe siècle, et avec lui, d’abord, les catégories d’art et de monument. Ce phénomène est encore plus récent en Iran. Le dernier exemple du renouveau de ces processus d’institution patrimoniale réside sans doute dans l’inscription sur les listes UNESCO des expressions du patrimoine culturel immatériel, après la récente invention par l’UNESCO de cette « nouvelle » catégorie de patrimoine (2003). Désormais, l’identification de ce patrimoine vivant n’est plus réservée à des experts extérieurs, mais aux acteurs mêmes de ces pratiques traditionnelles. Ce « tournant patrimonial » invite à interroger plus avant les processus même de fabrication du Patrimoine.
L’objectif de cet axe de recherches est d’éclairer les phénomènes d’élaboration du Patrimoine à partir de la prise en compte de positionnements théoriques et de méthodologies variés autour de quelques grandes questions : quelles relations dialectiques se nouent entre attestations historiques (sources scripturaires, monuments et objets) et modes de valorisation contemporains ? Quels rôles joue le développement de nouvelles technologies (prospection géophysique, drones, etc.) dans la création du Patrimoine ? Comment les politiques globales de l’UNESCO contribuent-elles au renouvellement contemporain du Patrimoine au niveau national et/ou local et avec quels effets ? In fine, ce programme vise également l’ouverture de l’analyse de cette aire géoculturelle très riche que représente l’Iran à des questionnements plus globaux sur le patrimoine, en diversifiant les échelles entre local et global.
Ces recherches se développent dans le cadre d’une collaboration scientifique franco-iranienne réalisée avec le soutien de l’Institut français de recherches en Iran (IFRI) autour du Memorandum of understanding (MOU) signé en novembre 2017 entre l’EHESS et l’Université de Téhéran, avec comme partenaires principaux à l’EHESS, Claudine Gauthier (membre titulaire de l’Institut interdisciplinaire du contemporain, équipe Laboratoire d’anthropologie et d’histoire de l’institution de la Culture ; IIAC-LAHIC, UMR 8177 CNRS-EHESS) et Fabrizio Speziale (DE d’études à l’EHESS), qui sont les responsables pédagogiques de l’accord pour l’EHESS. Plus généralement, ces recherches visent à contribuer au renforcement de la coopération scientifique entre la France et l’Iran.