M. Jannic DURAND, directeur du département des Objets d’art du musée du Louvre
« Le département des Objets d’art, héritier privilégié des collections royales »

Le 16 avril 2018

Au cours du XVIIIe siècle, s’impose peu à peu en France l’idée d’un musée qui, à Paris, puisse réunir et présenter aux artistes et au public une sélection d’œuvres maîtresses des collections royales. Un premier projet de musée au sein du Palais du Louvre est évoqué dès 1768 mais rapidement abandonné. Il aboutit, néanmoins, sous le règne du roi Louis XVI, à l’ouverture régulière, quelques jours par an, du Garde-Meuble de la Couronne. Le Garde-Meuble de la Couronne, établi place de la Concorde, abrite alors les meubles et objets d’art destinés principalement à meubler les résidences royales.

Il faut toutefois attendre la Révolution pour voir la naissance et l’ouverture officielle du Museum en 1793, le futur musée du Louvre, installé dans le palais du Louvre. Ce premier musée réunit des tableaux, des dessins, des cuivres de gravures, et des sculptures antiques des collections royales, qui sont aux origines de trois des départements du musée d’aujourd’hui : le département des Peintures, le département des Arts graphiques et le département des Antiquités grecques, étrusques et romaines.

En même temps, sont aussi transférés du Garde-Meuble de la Couronne au nouveau musée du Louvre plusieurs ensembles d’objets d’art de toute première importance : des meubles, les collections de bronzes de la Couronne et les collections de vases en pierres dures à monture d’orfèvrerie de Louis XIV. Ces collections sont à la base de l’actuel département des Objets d’art. Elles sont presque aussitôt rejointes par les restes des grands trésors ecclésiastiques de Saint-Denis et de la Sainte-Chapelle, épargnés par la Révolution, puis, en 1830, par les vestiges du trésor de l’ordre du Saint-Esprit.

Le musée se développe dans la première moitié du XIXe siècle : grâce à Champollion, il s’ouvre sur la civilisation égyptienne avec la création du Musée égyptien en 1826, futur département des Antiquités Egyptiennes ; il s’ouvre en 1847 sur l’Orient avec le Musée assyrien, prélude au département des Antiquités orientales. Dès 1848, les Sculptures du Moyen Âge, de la Renaissance et des Temps modernes s’individualise au sein des Antiques, de même que les Objets d’art qui, à leur tour, commencent à s’émanciper des Sculptures avec la création du « Musée des Souverains » par Napoléon III en 1852.

À partir du noyau initial des collections royales, les collections du département des Objets d’art n’ont cessé durant deux siècles de s’élargir dans tous les domaines des arts décoratifs. Mais elles ont aussi continué à s’enrichir d’objets des souverains français : Diamants de la Couronne en 1887, chefs-d’œuvre du mobilier du XVIIIe siècle à partir de 1901, ou encore, à partir des années 1950, orfèvrerie et porcelaines du XVIIIe siècle, meubles et objets du Premier Empire, de la Restauration et de la Monarchie de Juillet. Ce sont tous ces ensembles, auxquels se sont encore adjoints en 1993 les Appartements Napoléon III, qui donnent au département des Objets d’art du musée du Louvre une physionomie et une identité très particulières au sein des musées consacrés aux objets.

 

Jannic Durand est archiviste-paléographe, conservateur général du Patrimoine et depuis 2013, directeur du département des Objets d’art du musée du Louvre. Spécialiste du Moyen-Âge et de l'art byzantin, il est également chargé de cours à l'École du Louvre. Il a notamment publié L’art au Moyen-Âge, Paris, 1989, Le Louvre. Le département des Objets d’art, Paris, Scala, 1995, ainsi que L’art byzantin, Paris, 1999. Il a été commissaire de plusieurs expositions, dont Byzance, l’art byzantin dans les collections publiques françaises, musée du Louvre, 1992- 1993, Le trésor de la Sainte-Chapelle, musée du Louvre, 2001, Armenia sacra, Mémoire chrétienne des Arméniens (IVe-XVIIIe siècles), musée du Louvre, 2007, Sainte Russie, l’art russe des origines à Pierre le Grand, musée du Louvre, 2010.